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Quand on vit avec une maladie chronique ou un handicap invisible, la salle de consultation devient souvent un second domicile. On y vient chercher des réponses, de l’aide, un soulagement. Mais trop souvent, on y ressort plus seul·e encore, incompris·e, voire jugé·e.

Ce texte n’est pas une attaque contre les soignants. Il est un appel. Un plaidoyer pour une médecine plus humaine, dans laquelle la relation patient·e-médecin redevient un espace de confiance, de respect… et d’écoute réelle.


L’écoute : une compétence médicale à part entière

Écouter, ce n’est pas juste laisser parler.
C’est accueillir une expérience, sans filtre, sans a priori, sans chercher immédiatement à catégoriser ou minimiser.

Trop souvent, on entend :

  • “C’est dans votre tête.”
  • “Vous êtes trop sensible.”
  • “Je ne vois rien d’anormal.”

Mais ce que vit la personne est bien réel, même s’il n’apparaît pas sur une radio ou une prise de sang.
Écouter, c’est reconnaître la légitimité du vécu de l’autre, même quand on ne le comprend pas entièrement.


Ce que les patients attendent

Nous ne demandons pas des miracles.
Nous demandons :

  • Qu’on nous croit, même quand nos symptômes sont atypiques.
  • Qu’on prenne le temps, même si ce n’est que 10 minutes, de nous regarder dans les yeux.
  • Qu’on explique, avec des mots simples, les diagnostics, les incertitudes, les limites.
  • Qu’on nous parle comme à des partenaires de soin, et pas comme à des corps défectueux à réparer.

Quand la maladie ne se voit pas

Les maladies invisibles – comme la syringomyélie, la fibromyalgie, les troubles neurologiques rares – sont souvent déroutantes.
Pour les patient·es, elles sont un parcours du combattant. Pour les médecins, elles peuvent être frustrantes, complexes, dérangeantes.

Mais nier la souffrance parce qu’on ne la comprend pas, ce n’est pas neutre. C’est une forme de violence institutionnelle, même involontaire.


Une médecine qui soigne le corps, mais aussi la personne

L’empathie ne s’oppose pas à la rigueur scientifique. Elle la complète.
Une médecine empathique, ce n’est pas une médecine “molle”.
C’est une médecine plus complète, qui considère le contexte de vie, l’histoire, les émotions.
Une médecine qui soigne, mais surtout qui prend soin.

Les maladies rares et invalidantes ont souvent des conséquences sociales pour les personnes, des patients tes ont parfois l’impression de ne servir à rien, se tournent dans des médecines « naturelles » en raison de l’insuffisance de la médecine « classique ».


Que peuvent faire les médecins, concrètement ?

Voici quelques gestes simples mais puissants qui changent tout pour un·e patient·e :

1. Nommer l’incertitude sans la nier

“Je n’ai pas encore toutes les réponses, mais je vous crois. Continuons à chercher ensemble.”

Une phrase comme celle-là soulage plus qu’on ne l’imagine. Elle ouvre un espace de confiance.


2. S’intéresser à la vie du·de la patient·e, pas seulement à ses symptômes

“Comment cette douleur impacte-t-elle votre quotidien ?”

Cela humanise la consultation et donne une vraie place au vécu.


3. Faire preuve d’humilité professionnelle

Personne ne peut tout savoir. Mais savoir orienter vers un·e collègue ou un centre spécialisé, c’est aussi soigner.


4. Prendre quelques secondes de silence

Laisser au patient ou à la patiente un temps pour formuler ce qui est difficile à dire peut parfois faire émerger ce qui est essentiel.


5. Lire ou écouter des témoignages de patient·es ET impliquer les patients tes dans vos travaux de recherches

Cela nourrit l’empathie, affine la pratique et renforce la qualité relationnelle. De plus en plus de conférences de patient·es ou de patients-expert·es sont disponibles. On a souvent tendance à laisser les patients tes de côté dans les travaux de recherche, il me semble pertinent de les inclure!

Témoigner pour transformer

En tant que personne vivant avec une maladie chronique, je témoigne de ce que je vis, ainsi que d’autres pairs vivent dans ma conférence gesticulée.
Je parle de la douleur, de l’errance médicale, du manque de reconnaissance… mais aussi de tous ces médecins qui m’ont écouté, soutenu, respecté.
Parce que l’espoir est là : dans la formation à la relation, dans le dialogue, dans le changement de culture médicale.

.À vous qui soignez : vous avez entre les mains bien plus que des ordonnances.
Vous avez le pouvoir de reconnaître, de dignifier, de réparer autrement.
Écoutez-nous. Vraiment.

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